Pour un verre plus vert !

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En France, on commence à recycler le verre dès 1974 ; cette technique remplace la consigne qui était pourtant très répandue … Et pour cause : la consigne semble être « logique » : pourquoi casser et refondre le verre quand on peut simplement le réutiliser ?  Aujourd’hui, on recycle presque 70% des contenants en verre …. Mais le recyclage est-il vraiment la bonne solution ? Petit tour d’horizon de la gestion du verre sur le territoire de la Métropole de Lyon, des problématiques liées à son recyclage et des alternatives à connaître et à questionner!

Que devient le verre trié par les Lyonnais ?

Les Lyonnais doivent amener leur verre dans des silos : c’est ce que l’on appelle une collecte en « point d’apport volontaire »

La quantité de verre collectée est en augmentation sur le territoire lyonnais : en 2015, la métropole collecte 20,6 kg de verre par habitant, contre 18,8 kg en 2014. Soit les Lyonnais ont plus de déchets en verre, soit ils trient mieux. La moyenne française elle est à 29 kg/hab/an : objectif de progression pour les Lyonnais ou simplement des habitudes de consommation différentes ? À vous de voir ! Pour encourager un plus grand taux de captation, le Grand Lyon propose aux communes de concourir au « trophée du verre »[1] : ce prix récompense chaque année la commune qui s’est le plus engagée dans la collecte séparée du verre et dans la sensibilisation au tri de ce dernier. Ce trophée du verre va de pair avec la remise d’un chèque à la ligue du cancer ; en effet, pour chaque tonne de verre collectée, la métropole du Grand Lyon s’est engagée à reverser trois euros à la ligue contre le cancer (possible grâce à la vente du verre). Cependant, la proportion de verre recyclé à Lyon diminue ! En 2015, on recycle 26 265 tonnes de verre alors qu’en 2014 nous étions à 26 310 tonnes. Dans son rapport de 2015,[2] le Grand Lyon annonce que des problèmes logistiques (notamment les congés des transporteurs), ont perturbé les collectes et donc le recyclage… En effet, la gestion des déchets en verre requiert une très grande organisation… On vous embarque ? 

La gestion du verre comprend plusieurs étapes (voir Schéma 1). Sur le territoire du Grand Lyon, le verre est trié à la source par les habitants qui l’apportent de manière volontaire dans des silos implantés dans leurs quartiers. Il existe 2 294 silos à verre répartis sur les 59 communes, soit un silo pour 583[3] habitants. De nouveaux silos voient régulièrement le jour pour mieux mailler le territoire.

La prochaine étape, vous la connaissez, ou plutôt vous l’entendez ! Un camion payé par la Métropole vient régulièrement collecter le verre pour l’amener vers des plate-formes de massification. Il faut avoir assez de verre pour l’envoyer ensuite en traitement et ainsi optimiser les coûts de transport et de rachat. Votre verre se trouve alors à St-Fons dans l’entreprise Guérin.

Le verre est ensuite dirigé vers des usines de traitement pour le préparer pour son recyclage. Une batterie impressionnante d’opérations supplémentaires de tri est nécessaire sur votre verre, pourtant déjà trié : tri par souffleuses, tri par couleurs, aimants pour séparer les métaux[4]  … avant d’être broyé en minuscules billes de verre, ce qu’on appelle le calcin. Le verre des Lyonnais est envoyé dans trois usines de recyclage appartenant à l’entreprise O-I Manufacturing France : à Béziers (360 km de Lyon), Labégude (170 km de Lyon) et Veauche (80 km de Lyon).  Ces grosses usines peuvent traiter jusqu’à 1000 tonnes par jour, ce qui représente un certain nombre de bouteilles !! Le calcin obtenu est vendu aux entreprises verrières qui le transforment en nouvelles bouteilles. Pour obtenir celles-ci, le calcin doit être fondu à une température de plus de 1500°C. En fin de chaîne, le verre est remis sur le marché par des conditionneurs qui remplissent ces nouveaux emballages.

Schéma 1 : Les différentes étapes du verre lyonnais Adaptation Zéro Déchet Lyon à partir d’Eco-Emballages

Combien cela coûte ? Le Grand Lyon a payé un peu plus de 2 millions d’euros en 2015[5] pour le recyclage du verre (soit 77 €/t contre 278 €/t pour les recyclables de la poubelle jaune et et 217 €/t pour les ordures ménagères résiduelles). Mais le recyclage est-il vraiment LA solution ? Faisons le tour des limites liées à cette technique.

Le recyclage, la panacée ?

Même si des silos à verre sont présents sur les quais du Rhône, de nombreuses bouteilles finiront dans la poubelle grise et en donc en incinération… photo : (c) Lyon City Crunch

Premièrement, il peut y avoir des problèmes de captation du gisement : certains ménages, ou encore certains restaurateurs, ne trient pas : silos « trop » loin, manque de place pour stocker le verre, manque de sensibilisation, non-intérêt…Le résultat ? une partie du verre est incinéré, avec les problématiques que l’on connaît (mâchefers, émissions, moins d’emploi…). Le verre usé non recyclé serait environ de 25% en France.

Les erreurs de tri sont fréquentes et ont pour conséquence des coûts financiers et environnementaux supplémentaires.

D’autre part, souvent par manque de communication, les erreurs de tri de verre sont courantes. Par exemple, les couvercles des contenants ne sont pas acceptés. Il faut alors de nouveau trier le verre pour extraire ces matériaux (plastique ou métal). Le verre des ampoules, des téléviseurs, la céramique ou les miroirs sont également refusés… Les refus doivent être acheminés en centre d’enfouissement (ce qui entraîne une hausse de transports, des émissions de CO2, nuisances de l’enfouissement, etc). Ces trajets et traitements supplémentaires sont bien entendus facturés à la collectivité (et indirectement aux contribuables). On peut ajouter que les habitants lavent souvent les contenants en verre, or cette dépense en eau est inutile. La collectivité pourrait organiser des campagnes de sensibilisations pour améliorer le geste de tri.

Attention ! Si le verre se recycle à l’infini, les bouteilles en verre elles ne sont pas faites à 100% avec du verre recyclé! Le process est limitant. (c) Syvadec

Autre question clé : si le matériau est 100 % recyclable, le process verrier permet-il ensuite d’incorporer 100% de verre recyclé (calcin) ? Le process est en fait limitant car il ne peut supporter plus de 85-90% de calciné. Le reste est une pâte neuve pour recréer une bouteille. Cette industrie est très énergivore[6] et produit des émissions, même si la température reste inférieure à la fusion du sable nécessaire à la fabrication du verre pour créer une nouvelle bouteille.Les fours ne sont pas adaptés à tous les types de verre : le pirex, par exemple, laisse un dépôt et abîme les machines … les coûts de maintenance n’en sont que plus élevés.

Enfin, comme nous l’avons décrit avec les différentes étapes de la collecte et du process, le recyclage du verre réclame beaucoup de transport, pour un matériau très lourd. Pour que le recyclage soit le plus écologique possible, il est nécessaire que les filières de valorisation soient assez proches du lieu de production de déchets, afin d’en réduire les coûts et les nuisances. Le verre étant lourd il nécessite beaucoup de carburant pour son transport.

Toutefois le meilleur déchet est bien celui qui n’existe pas. Il existe des alternatives pour ne pas avoir à broyer et faire fondre une bouteille en verre qui aura servi une seule fois.

Mais des alternatives existent !

Le futur est dans le passé: la consigne

Il suffit de se rendre chez nos voisins européens pour comprendre les différences en matière de gestion et de réutilisation du verre. En Allemagne, la consigne est profondément ancrée dans la culture et depuis 2003, la loi fixe un minimum de 72 % de réutilisation des bouteilles…  Un objectif ambitieux mais réaliste[7].

Longtemps répandu en France, le système de la consigne n’a pas résisté au développement des produits jetables à usage unique et du plastique qui a émergé au début des années 1970[8]. Pour rappel, la consigne est un système fondé sur le principe d’un dépôt de garantie. Le consommateur achète un produit et son contenant au détaillant, puis il le rapporte vide et se voit rembourser le prix de ce dernier. Le contenant est alors récupéré, nettoyé puis réemployé dans le processus de fabrication d’un autre produit[9]

Elle représente une économie non négligeable pour les producteurs car le coût d’un emballage qui a été relavé est moins important qu’un emballage neuf[10]. Bien sûr, il n’est pas question de faire voyager des bouteilles vides sur des milliers de kilomètres. La consigne est viable dans un rayon de 300km maximum, ce qui permet de dynamiser une économie locale avec des emplois non délocalisables. La consigne est un mode de gestion du verre qui crée plus d’emplois que le recylclage.

Sur le plan environnemental, la bouteille consignée a plusieurs cycles de vie contrairement à la bouteille à usage unique. A titre comparatif, dans certaines conditions, une bouteille consignée peut émettre jusqu’à 80 % de moins de gaz à effet de serre qu’une bouteille à usage unique durant tout son cycle de vie.

La consigne, expliquée par (c) Consilyon

Sur la métropole du Grand Lyon, plusieurs initiatives de ré-introduction de  la consigne existent ; c’est notamment de cas du projet Consilyon. Créé en 2010, son objectif est de récupérer des bouteilles en verre dans des lieux de collectes (restaurants, épiceries, associations, MJC…) pour ensuite les laver et les ré-acheminer chez les producteurs. Cette entreprise serait créatrice d’emploi. Un projet à suivre qui devrait se lancer courant 2018.

Enfin, de nombreuses épiceries en vrac ont mis en place des systèmes de consigne en partenariat avec leurs fournisseurs respectifs (pots de confiture, de sauce, etc). C’est notamment le cas d’À la source. L’entreprise Vrac’n’roll propose elle des produits alimentaires dans des bocaux consignés.

En attendant la consigne, agissons aussi à titre individuel…

Nous pouvons laver les contenants en verre et les réutiliser pour acheter ses aliments en vrac et les conserver ou leur trouver de nouveaux usages (boites de rangement, porte-bougie, vase..).  Beaucoup d’aliments normalement emballés dans le verre sont à présent disponibles en vrac dans les différentes épiceries de Lyon (moutarde, huile, vin…). Vous pouvez les retrouver grâce au localisateur de produits en vrac lyonnais Abracadavrac. D’un point de vue santé, le verre est préférable au plastique.

Article rédigé par le pôle Plaidoyer de l’association Zéro Déchet Lyon

Références :

[1] https://www.lissieu.fr/Lissieu-remporte-le-Trophee-du-Verre.html?retour=back
[2]  https://www.grandlyon.com/pratique/publications-dechets
[3] https://www.grandlyon.com/fileadmin/user_upload/media/pdf/proprete/rapports/20170124_gl_proprete-rapportannuel2015.pdf
[4] Il y a trois types de tri : un premier tri qui élimine les matières ferreuses, un deuxième qui sépare le verre des matières infusibles, un troisième qui élimine les éléments légers (bouchons, papier …)
[5] https://www.grandlyon.com/fileadmin/user_upload/media/pdf/proprete/rapports/20170124_gl_proprete-rapportannuel2015.pdf
[6]  « Le potentiel de réchauffement climatique lié aux émissions de GES exprimés en kg de CO2 équivalent représente pour le consigné 21 % des émissions dans l’air dégagées par le verre à usage unique sur la totalité du cycle de vie. » Etude Deroche Consultants, « Bilan environnemental de la bouteille en verre consignée « 75 cL Alsace » commercialisée dans l’Est de la France par comparaison avec une bouteille en verre à usage unique« , 2009 )
[7]   http://www.bioalaune.com/fr/actualite-bio/12618/comment-lallemagne-fait-guerre-aux-bouteilles-vides
[8]   http://www.terraeco.net/Elle-court-elle-court-la-consigne,53816.html
[9]   https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/recyclage-le-grand-retour-de-la-consigne-1949137
[10]  http://www.journaldelenvironnement.net/article/consigne-pour-les-bouteilles-en-verre,9911

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